Il y a 30 ans, Thierry Boutsen s’imposait au Canada : “Un immense soulagement”
Trente ans plus tard, Thierry Boutsen revient sur son triomphe au Canada.
- Publié le 18-06-2019 à 07h48
- Mis à jour le 25-06-2019 à 11h32
Trente ans plus tard, Thierry Boutsen revient sur son triomphe au Canada. Ceux qui ont assisté à ce moment en ont encore les larmes aux yeux. Le 18 juin 1989, seize ans et onze mois après Jacky Ickx, Thierry Boutsen décrochait la première victoire de sa carrière en s’imposant à Montréal. Un succès acquis dans des circonstances rocambolesques, mais que le Bruxellois attendait depuis six années. Boubou, brillamment reconverti dans l’aviation, s’en souvient comme si c’était hier. Car c’est bien connu qu’on n’oublie jamais sa première fois…
Thierry, quand vous arrivez chez Williams en 1989, vous estimez-vous un candidat pour la victoire ?
"Je suis arrivé dans une nouvelle équipe qui découvrait un nouveau moteur. Le V10 était une toute nouvelle architecture en F1 mais, si Renault l’a choisie, je savais que c’était pour gagner à terme. La préparation ne fut toutefois pas idéale car j’ai été victime d’un gros accident en essais privés à Rio. Ce crash m’a décontenancé. De surcroît, la Williams était une évolution de la voiture de l’année précédente, qui était déjà mal née. Je savais que je pouvais faire quelques coups d’éclat, mais le titre mondial était d’emblée hors de portée."
Quand vous arrivez au Canada, pensez-vous gagner ?
"Sur le sec, je savais que mes chances étaient minuscules. Mais, heureusement, ce fut une autre histoire quand il pleuvait. Et le jour de la course, il a beaucoup plu et il a fallu changer des pneus à plusieurs reprises. La météo était clairement mon alliée pendant ce week-end."
Quelle stratégie aviez-vous choisie ? Course d’attente ou grosse attaque ?
"L’équipe ne m’avait rien imposé du tout ! J’ai dès lors choisi de rouler le couteau entre les dents, tout en gardant une certaine marge de manœuvre car il était très facile de se sortir au vu des conditions."
Quand Ayrton Senna abandonne à deux tours du but, réalisez-vous que vous êtes en passe de gagner ?
"Je n’ai pas réalisé sur le coup car je ne voyais tout simplement pas le panneautage de l’équipe tant la visibilité était mauvaise. Je suis resté concentré et c’est seulement quand j’étais dans le dernier tour que j’ai réalisé que j’étais en tête de la course."
Qu’est-ce qu’on ressent quand on franchit la ligne d’arrivée en vainqueur ?
"J’ai ressenti un immense soulagement. C’était ma toute première victoire et j’ai attendu près de 100 Grands Prix pour la décrocher. Je savais depuis longtemps que j’étais capable de gagner en Formule 1. Mais je n’avais pas eu jusqu’alors une voiture capable de gagner. À vrai dire, je pense même que j’aurais pu réaliser un meilleur début de saison que celui que j’ai connu. Mais je n’étais pas entièrement remis de mon accident brésilien pendant lequel j’avais été touché aux vertèbres et je ne pouvais pas encore rouler à 100 % de mes capacités."
Avec la petite colonie belge présente sur place, l’ambiance d’après-course devait être particulière…
"Effectivement. Les journalistes Pierre Van Vliet, Richard Debeir et Christian Lahaye étaient sur place. Après la course, nous sommes allés chez des amis qui avaient une villa dans le coin. C’était très sympa."
Une horde de fans vous attendaient à votre retour en Belgique. Une sacrée surprise, non ?
"C’était un moment spécial pour moi car je n’avais eu affaire à un tel engouement auparavant. C’était la première fois qu’un comité d’accueil m’attendait en descendant de l’avion. J’étais très surpris, je ne m’y attendais clairement pas."
De vos trois victoires, laquelle préférez-vous ?
"La première a une saveur particulière car c’est justement la première. Les trois sont tellement différentes et ont, chacune, été acquises dans des circonstances différentes. Au final, qu’il s’agisse du Canada, de l’Australie ou de la Hongrie, il n’y en a pas une que je préfère par rapport à une autre."
Pensez-vous qu’un Belge reviendra un jour en F1 et gagnera ?
"Je l’espère réellement. Il y a de la place pour un pilote belge en Formule 1. Maintenant, les budgets sont prohibitifs. Stoffel est peut-être le dernier à être arrivé en F1 sans mettre de sa poche. Sur les 20 places disponibles, dix d’entre elles sont occupées par des pilotes payants. Il faut se battre contre ces gars-là et trouver les arguments adéquats pour retrouver un Belge dans le futur. Donc, pourquoi pas ?"